Olivier Madar, l’interview

25/03/2011

A 40 ans, dont plus de 31 années passées sur l’eau, Olivier Madar est aujourd’hui un SUPer enthousiaste comme beaucoup d’autres mais qui a, en prime, décidé de faire de sa passion son métier… A la tête en effet de la marque de pagaies, Outside Reef, le montpelliérain fait son bonhomme de chemin dans l’univers professionnel du SUP avançant au fil des mois. Rencontre avec un vrai passionné…

 

SUPJournal.com : Quand et comment as-tu découvert le SUP ?
Olivier Madar : J'ai découvert le surf debout à la rame en mai 2007. J'étais au Pays Basque. On partait surfer avec Peyo Lizarazu. Moi j'ai mis ma combinaison intégrale et j'ai vu Peyo partir à l'eau en short et se régaler en prenant pleins de vagues !? C'était le déclic !! Le même été, j'ai trouvé du matériel, et j'ai commencé. Sinon, longtemps avant, j'avais déjà vu au loin, un gars qui ramait debout sur une planche, c'était à Maui, un certain Laird Hamilton...

 

SUPJ : Tu as pratiqué de nombreux autres sports de glisse auparavant, qu'est-ce qui t'a séduit en particulier dans la pratique du SUP ?
OM : J'ai passé 6 ans comme rider pro windsurf sur le circuit PWA. J'ai eu la chance de parcourir les plus beaux spots du monde, mais aussi les plus radicaux. Aussi bien les vagues géantes d'Hawaii que les tempêtes sur la mer du nord en octobre... J'ai donc passé ma vie ou presque, à courir après le vent... Et là j'ai flashé sur ce sport sans vent ! Mais qui permet d'avoir la même attitude: debout sur l'eau. Je crois que c'est en fait cette sensation que j'ai toujours adoré. Remonter les vagues debout, être toujours en action, avec le minimum de temps morts. Comme tous ceux qui courent après le vent, c'est peut-être aussi un bon moyen de relâcher les années d'attente ou de frustration due au manque de vent ! Le plaisir aussi de découvrir d'autres endroits et de s'échapper des spots surpeuplés des bords de plage... Et puis les sensations de réapprendre un nouveau sport, de maitriser cet engin, le plaisir aussi de partager de rencontrer des nouvelles personnes. En plus, les gens viennent vraiment d'univers différents comme les filles qui viennent l'équipe de France de Ski avec Nathalie Ville Gropiron, Julie Duvillard, Karen Allais ou du tennis avec Guy Forget ou encore du cinéma avec José Garcia. Et puis tous ceux moins connus que je rencontre et qui viennent du rugby, de l'athlétisme, ou simplement des restaurateurs, des vignerons, etc... C'est ce brassage que j'adore avec ce sport ! C'est tellement accessible et bon pour le corps. L'autre satisfaction est celle de pouvoir partager avec ses enfants et sa femme. Je peux partager avec mes garçons de 6 et 7 ans et ça c'est fantastique. Le SUP c'est "juste" le pur plaisir de la glisse, même sur un lac glassy, la sensation de simplement glisser sur l'eau sans bruit et sans efforts...

 

SUPJ : Comment est née la marque Outside Reef que tu as lancé il y a maintenant 4 ans ? Et pourquoi des pagaies d'abord plutôt que des planches par exemple ?
OM : L'histoire est assez simple. C'est encore aujourd'hui celle d'une start up... Je découvre le SUP et je me rends compte que c'est la pagaie qui caractérise ce sport. Celles qui sont disponibles à l'époque sont vraiment nulles ! Lourdes, beaucoup trop rigides, moches... Donc je cherche pour me faire plaisir, une belle pagaie en bois et je n'en trouve pas ! Sauf à en faire venir une d'Hawaii, lourde et à 400 $ sans le port !!! Je commence à chercher un savoir-faire, une usine, j'en fais quelques-unes qui partent immédiatement autour de moi ! Je développe, teste, mets au point... dans mon garage ! Je crée alors la marque Outside Reef. Le nom est explicite et va bien pour ce nouveau sport : Va au-delà du récif ! Va prendre les grosses vagues du large... Découvre de nouveaux horizons, c'est la philosophie qui est derrière ce nom. Pour la petite histoire, c'est Peyo Lizarazu qui est le surfer du logo. Je tiens à remercier Peyo qui est avant tout un ami depuis plus de 15 ans et sans lui rien n'aurait été pareil. La suite, c'est une histoire de potes, on crée des nouveaux designs avec un ingénieur. Les pagaies sont belles, efficaces et performantes. Peyo, fait sa première coupe du monde en février 2010. Il réalise un exploit ! Un français en finale à Hawaii avec tous les meilleurs mondiaux. Je suis avec lui sur la plage à Sunset. Et je suis fier. Fier de voir qu'en France, on peut faire aussi bien, voire beaucoup mieux que les marques américaines qui viennent du kayak ou de la pirogue.... Pour ce qui est des planches, je pense que ce sont encore les shapers comme Barland, Skud qui connaissent le mieux les courbes des planches... Je me lancerai peut-être un jour dans une marque de planches mais ce n'est pas une priorité pour moi. Et des grandes marques multi glisses comme Naish fournissent aujourd'hui des bonnes planches standards.

 

SUPJ : En toute objectivité, qu'est-ce qui différencie selon toi une bonne d'une moins bonne pagaie ?
OM : D'abord, une bonne pagaie, c'est celle qui a un bon spirit, celle qui a une bonne gueule, celle que l'on est fier d'utiliser ! Ensuite au niveau technique il y a plein de paramètres... Je pourrais en parler pendant des heures. Mais d'une manière générale les pagaies trop raides sont mauvaises pour votre corps. En SUP, il faut apprendre à se servir du flex du manche. Ensuite, il faut une pagaie à sa taille, aussi bien en longueur qu'en puissance de pale... Il faut en essayer plusieurs et trouver celle pour son style. Je vais profiter de cette interview pour pousser un petit coup de gueule sur le marketing de certaines marques qui trompent les riders novices sur leur choix ! Sauf rares exceptions dues à une construction super light ou super renforcée, il n'y a pas de pagaies de vagues ou de pagaies de race ! Il y a simplement des bonnes pagaies et des mauvaises pagaies ! Pales larges pour la Race ? Et petites pour les vagues ? C'est très très souvent faux !! J'ai la chance d'avoir le retour des meilleurs riders de la planète, Peyo Lizarazu, Arsène Harehoé, Xabi Lafitte, Antoine Albeau et beaucoup veulent de la puissance pour démarrer fort sur une vague ! Et beaucoup veulent une pagaie plus petite et douce pour une course de 20 kilomètres !!! Mais le contraire est aussi vrai ! Une petite pagaie c'est beaucoup mieux pour surfer quand le vent est onshore et que c'est dur de passer la barre ! Et une grosse pagaie pour une course rapide, ça peut être beaucoup mieux ! Donc étudiez le design, essayez par vous-même, écoutez les riders et moins les services marketing des grosses boites...

 

SUPJ : SUPer comme Mr tout le monde, tu as aussi logiquement un regard très professionnel sur la pratique du SUP, comment la vois-tu se développer dans les prochaines années en France et dans le monde ?
OM : J'étais chez Robby Naish l'hiver dernier à Kailua, et nous parlions du sport et il m'a dit "Olivier, tu imagines si nous qui pratiquons la glisse extrême depuis plus de 30 ans, si nous on flashe en se baladant sur un lac, alors imagine ceux qui découvrent cette glisse...!". Et il a raison, donc, de plus en plus de gens essayent et adoptent simplement ce sport ! Mais pour être clair au niveau économique, le marcher grossit, certes mais moins vite que les nouvelles marques qui arrivent tous les mois ! Pour ce qui est des produits, je trouve que la mode des planches trop courtes n'est pas bonne et on perd rapidement le charme et le partage du sport. Dans mon quiver à côté des petites planches de 8'5’’, j'ai toujours et je garderai toujours une grosse 11'6’’ pour me balader, pour surfer en tandem, pour apprendre aux copains. Pour ce qui est de la pratique future, c'est tellement vaste ! Du fitness tranquille, à la course extrême, du surf de mini vagues aux monstres de 6 mètres, de la pratique en rivière, au mascaret, de la découverte écolo à la balade urbaine, de 5 ans à 85 ans !!! Le monde est vaste, on n'a pas fini de le découvrir en se faisant du bien, avec une bonne pagaie dans les mains !

 

Photos : OutsideReef.com

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