Raphaël Salles, l’interview

27/08/2010

Windsurfer de renom dans le courant des années 80 puis kitesurfer de haut vol depuis une quinzaine d’années, le français Raphaël Salles est aujourd’hui un acteur incontournable dans l’industrie du kitesurf avec sa marque F-One. Toujours ouvert aux nouvelles formes de glisse, ce dernier a compris très tôt que kitesurf et SUP pouvaient mêler leurs destinées afin de proposer une pratique alternative, le kite SUP. En lançant dernièrement une aile spéciale et en proposant prochainement une gamme de planches, Raphaël Salles croit dur comme fer à ce croisement "intelligent" entre les deux disciplines et nous en parle sur SUPJournal.com.

SUPJournal.com : Tu pratiques le SUP comme beaucoup d'autres, c'est de la (re)naissance de ce sport qu'est né le concept Source ?
Raphaël Salles : J'ai commencé le SUP pour surfer et faire de la balade et naturellement, j'ai testé avec une aile car je cherche depuis toujours un engin qui puisse rendre le kitesurf super accessible et plus familial. J'ai testé pas mal de petites embarcations type pirogues et autres mais le SUP est vraiment l'engin parfait car il reste plus petit qu'un bateau et assez volumineux pour tenir debout dessus. Dès mes premiers tests en SUP avec une aile 2 lignes, j'ai adoré le type de glisse du SUP qui part au planing et qui flotte un peu au dessus de l'eau. Les virages sont aussi un grand moment car cela ressemble à un bottom turn full speed avec beaucoup d'appui. Avoir de telles sensations de glisse avec si peu de vent est fantastique, sans footstraps et souvent sans utiliser le harnais, on se sent plus libre et on fait vraiment du sport ! C'est aujourd'hui notre meilleur jouet pour le vent faible et les jours de plat.

SUPJ : Qu'est-ce qui t'a attiré dans la pratique du SUP et comment as-tu découvert ce sport ?
RS : J'adore le surf et je pratique le kitesurf dans les vagues le plus souvent possible. Un jour avec vagues mais sans vent, j'ai testé une planche de SUP et j'ai adoré ! Franchement au départ, je ne pensais pas qu'une si grosse planche pourrait me donner autant de sensations. J'avais vu Laird Hamilton dans les années 90 à Maui et je me demandais ce qu'il faisait sur ce paquebot. Maintenant je sais... J'aime aussi glisser à la rame quand il n’y a pas du tout de vent pour la balade.

SUPJ : Cette pratique du kite SUP touche plusieurs types de pratiquants, du néophyte en kitesurf à l'expert qui veut s'amuser dans le vent léger mais quels avantages peut y trouver un 100% SUPer qui n'a jamais touché une aile de kitesurf de sa vie ?
RS : Je ne sais pas si c'est parce que j'ai utilisé le vent toute ma vie mais ramer en SUP avec du vent et du clapot est un véritable calvaire. On ne peut rien faire à part une descente mais ce n’est pas facile à organiser car il faut un moyen de transport pour retourner à son point de départ. Je pense que pour un 100% SUPer, l’aile de kite peut être un moyen de l'utiliser les jours ventés et découvrir de nouvelles sensations. On retrouve les appuis du surf sans vague avec en plus la traction de l'aile, le corps doit transmettre cette traction à la planche et toute cette énergie procure de grandes sensations. Un kite ne prend pas beaucoup de place et peut servir si les conditions ne sont pas idéales pour le SUP, en fait quelles que soient les conditions, on est sûr d'avoir une activité.

SUPJ : Comme pour le windsurf, on a l'impression que le kitesurf devient plus technique, plus "compliqué"... La pratique du kite SUP est-elle une solution pour séduire un public potentiel qui se sent déjà dépassé par la technicité du kitesurf ?
RS : Quand on a une passion on aime la partager et le kitesurf est un sport un peu extrême pour certains même si le matériel n'a jamais été aussi accessible. Le sport est comme une "échelle" qu'il faut gravir avec ses différentes étapes et niveaux et un sport comme le windsurf a placé de plus en plus de barreaux pour aller de plus en plus haut mais a dans le même temps scié les barreaux du bas. Du coup, très peu de personnes pouvaient accéder au plus haut niveau ou se faire simplement plaisir. Le surf par exemple est un meilleur exemple car il y a plusieurs choix pour débuter dans les vagues comme le bodyboard, le longboard ou maintenant le SUP. Le kite SUP est clairement plus accessible et rassurant car la flottaison de la planche permet d'utiliser des ailes moins puissantes. Cela peut être une étape ou une pratique saisonnière ou un complément pour le SUPer. Depuis que j'explique cette nouvelle pratique dans mon entourage, j'ai désormais plus de candidats pour partager ma passion.

SUPJ : Qu'est-ce qui composera cette gamme Source, plusieurs ailes, des planches également ?
RS : Pour les ailes nous proposons 9.0, 11.0, 13.0, 15.0 et 17.0 m², les plus utilisées sont 11.0 et 13.0 m². Il faut savoir que les Source sont des ailes en 2 lignes et n'ont pas la gestion de la puissance des ailes 4 lignes, ce sont donc des ailes de petit temps, soit de 6 à 18 nœuds de vent environ. Si un SUPer désire utiliser sa planche dans des vents irréguliers ou plus forts, il faudra qu'il apprenne à utiliser une aile 4 lignes. Du coté des planches, je suis sur l'eau en windsurf et en kitesurf depuis 1976 et j'ai toujours fait de la mise au point de flotteurs et du shape, impossible pour moi de rider sans avoir envie de faire mes propres designs. Nous avons le savoir-faire, la technologie et les bonnes unités de fabrication pour produire des planches de SUP, spécialement avec notre technologie bamboo sandwich que nous utilisons depuis 2 ans pour nos planches de kitesurf. On travaille sur une gamme de planches de SUP mais on prend notre temps car je trouve qu'il y a beaucoup trop de modèles sur le marché et que le choix est assez difficile. Je pense aussi qu'il faut une marque plus européenne dans son approche du SUP. Nos planches seront des planches de SUP avec lesquelles on peut faire du kite et pas des planches spéciales kite SUP avec lesquelles on pourrait faire du surf.

Photos : Manu Morel/Régis Mortier/Jacqueline d'Entremont - F-One